http://www.sharkfoot.fr/2012/07/om-elie ... ilibriste/Sharkfoot » France » OM : Elie Baup, l’équilibriste
Publié le 06.07.2012 à 10:30 par Johann Alessandroni
L’Olympique de Marseille a présenté son nouvel entraîneur, Elie Baup, et espère trouver une nouvelle dynamique dans son projet où la pérennité financière du club est en haut de l’affiche. Sans club depuis 2009, Elie Baup a exercé avec brio son rôle de consultant au Canal Football Club où son sens tactique est régulièrement remarqué. Retour sur le parcours du néo entraîneur marseillais, de ses organisations et l’évolution de sa philosophie de jeu.
L’évolution de son 4-4-2 entre Saint-Etienne et Bordeaux
AS Saint-EtienneSi Elie Baup n’a plus entraîné depuis trois ans, ne nous y trompons pas, le natif de Saint-Gaudens est parfaitement rôdé aux joutes de la Ligue 1. Ses débuts d’entraîneur de l’équipe première, Baup les fera à Saint-Etienne en 1994 en succédant à Jacques Santini. Là-bas, le nouveau coach de l’Olympique de Marseille y dirigera Laurent Blanc, Willy Sagnol, Grégory Coupet et Gérald Passi, le frère de Franck, son adjoint à présent ! Malheureusement, les résultats ne suivent pas. Les Verts finiront relégués alors que Baup sera limogé quelques mois plus tôt, remplacé par Dominique Bathenay. A cette époque, les premières formations utilisées seront déjà avec deux attaquants de pointe. Durant son premier passage à Saint-Etienne, le 4-4-2 diamant est de rigueur avec une très faible efficacité. Une première évolution va alors apparaitre dans son schéma. La défense se retrouve trop facilement exposée aux offensives adverses avec la présence d’un seul milieu de terrain défensif. Concrètement, il y a trois joueurs qui ne défendent que très peu et ont une influence très faible sur le replacement défensif à la perte du ballon.

L’homme à la casquette va alors rebondir chez les Girondins de Bordeaux en étant l’adjoint de Guy Stéphan, l’adjoint de son prédécesseur, Didier Deschamps, à l’Olympique de Marseille ! Il prend sa place à la fin de l’année 1997 alors que l’équipe occupe une décevante 7e place. Baup parvient à décrocher une encourageante 5e place et commence, surtout, à installer ses principes. La saison suivante sera celle de l’heure de gloire. Baup remporte le championnat à la dernière journée grâce à un but de Pascal Feindouno au nez et à la barbe de… l’Olympique de Marseille.
On découvre alors son fameux 4-4-2 trapèze, parfaitement équilibré, qui fera sa marque de fabrique. Rien de bien révolutionnaire, mais la réflexion de Baup après ses difficultés à Saint-Etienne l’amène à descendre son numéro 10 et de renforcer la base défensive par deux milieux à vocation avant tout défensive. Avec Michel Pavon et Lassina Diabaté, les Marine et Blanc font la loi dans l’entre-jeu. Le plus intéressant se situe plus haut avec l’utilisation de deux milieux offensifs excentrés ayant le profil de meneur de jeu. Johan Micoud et Ali Benarbia ont le profil parfait. Très mobile et disposant d’une technique et d’une vision du jeu au-dessus de la moyenne, les deux joueurs malmènent les milieux adverses et servent avec précision et élégance Lilian Laslandes et Sylvain Wiltord. Avec la deuxième meilleure défense (0,85 buts encaissés par match) et la meilleure attaque (1,94 buts marqués par match), l’entraîneur bordelais propose un bloc-équipe très soudé dans un 4-4-2 à plat en phase défensive et alléchant en 4-2-2-2 en phase offensive.
L’apparition du 4-5-1 pour palier le manque de liant
Les saisons suivantes ne seront pas couronnées du même succès. Les Girondins resteront durant les 4 saisons suivantes au pied du podium (4e en 1999/2000, 2000/2001 et 2002/2003, 6e en 2001/2002). Baup ne changera jamais son schéma auquel il tient et croit beaucoup, malgré quelques incartades pour revenir partiellement à son 4-4-2 diamant lorsque la situation le demande, notamment lors de la saison 2000/2001. Bien que solide et équilibré, ce système montre ses limites lorsque les deux milieux offensifs sont esseulés et que les deux milieux récupérateurs se retrouvent trop éloignés des joueurs offensifs. En effet, il manque clairement un liant que Baup ne trouvera pas dans ses milieux, justement trop défensifs et non relayeurs.

Remplacé par Michel Pavon en octobre 2003, l’ancien gardien de but retrouve un poste à Saint-Etienne qui vient de remonter en Ligue 1. Malgré son statut de promu, les Verts créent la surprise et décrochent une remarquable 6e place, qualification pour la Coupe Intertoto. Déjà, la philosophie de jeu a évolué. Adieu le schéma à deux attaquants, place au 4-5-1 ! Baup a compris l’importance de la bataille du milieu et d’avoir des joueurs capables de récupérer le ballon, mais aussi de le relancer proprement et de faire le relais vers les joueurs offensifs. On y découvre alors l’excellent Didier Zokora qui accompagne Julien Sablé et David Hellebuyck. Sur les côtés, deux ailiers mobiles sont chargés de trouver l’attaquant. Frédéric Mendy, côté gauche, a un profil de joueur de couloir classique mais Nicolas Marin est plus apte à diversifier ses mouvements. Pascal Feindouno, côté droit, a un rôle de deuxième attaquant derrière Frédéric Piquionne. Après une saison suivante décevante (13e de Ligue 1, défaite 4-0 contre le rival lyonnais) et un conflit avec ses dirigeants, Baup quitte l’ASSE pour retrouver Toulouse où il a officié à la formation.

Au TFC, Baup confirme son 4-5-1 facilement modulable pour terminer à une étonnante 3e place qui qualifie le club en Ligue des Champions, avec un point d’avance sur quatre concurrents directs ! La ligne de conduite de Baup est fidèle à ce qu’il faisait chez les Verts. L’idée est de conserver le ballon en dominant le milieu adverse grâce à une formation où règne la compensation, le pressing par zone et la volonté de permettre à l’attaquant de pointe de se trouver en bonne position. Du coup, l’entraîneur du Téfécé est souvent dépendant du rendement de son buteur.
Devant la réussite de Johan Elmander, les performances de Mansaré et Bergougnoux notamment sont tout juste correctes mais passent inaperçues. La saison suivante verra l’écroulement du club présidé par Olivier Sadran et Baup fut limogé après une décevante 17e place. L’apport d’Achille Emana et de son profil de box-to-box ont poussé le coach marseillais a utilisé partiellement un 4-2-3-1 mais le 4-5-1 est resté de rigueur en laissant Emana plus libre que ses deux coéquipiers. Enfermé dans un schéma solide mais peu imaginatif, efficace mais dépendant, la première saison en trompe l’œil a masqué les limites de son effectif et le manque de surprise et de folie de son système. La recherche constante d’un équilibre presque parfait rend sa formation trop prévisible et facile à contrer lorsqu’on parvient à neutraliser, le plus souvent en les isolant, ses hommes clés.
Sa dernière expérience au FC Nantes est encore moins reluisante puisqu’elle s’est terminée sur une relégation avec une 19e place. Là-bas, Baup n’a pu sauver un groupe où la gestion des égos fut sa tâche principale avec des joueurs comme Ivan Klasnic ou Christian Wilhelmsson. Après un nouveau départ dans son 4-4-2 trapèze, les résultats ne suivent pas et il revient à son 4-5-1. A vrai dire, les tergiversations tactiques sont ce qui caractérise le mieux la saison nantaise tant les schémas ont changé de match en match. Avec des tentatives en 4-2-3-1, des résultats peu probants en 4-5-1 et des performances irrégulières en 4-4-2, Baup a cherché son équipe durant toute la saison, pour finalement ne jamais la trouver.
Préparation de l'Olympique de Marseille
L'Olympique de Marseille est en pleine préparation à Crans-Montana, sous la houlette de son nouvel entraîneur, Elie Baup. (OM.net)
Du nouveau à l’OM ?
Après trois ans passés à participer au Canal Football Club où son rôle de consultant est régulièrement souligné positivement, Elie Baup replonge dans le grand bain dans un contexte difficile à Marseille. Clairement, Baup a un sens aigu de la tactique et a su comprendre le fonctionnement et les aspects du championnat de France à travers ses expériences. L’évolution de ses schémas de jeu montre clairement des équipes de moins en moins portées vers l’offensive. Toutefois, renforcer son milieu de terrain ne veut pas dire être un entraîneur défensif. Il est intéressant de noter que Baup fut à plusieurs reprises un fervent défenseur de Lucho Gonzalez lorsque les critiques contre le Commandante étaient à son paroxysme.
Cela montre l’attrait qu’il a pour les joueurs au sens du jeu très développé et surtout, à l’importance des relayeurs dans une équipe, ce qu’il a tant recherché par le passé. Les premières déclarations laissent présager d’une volonté d’avoir le contrôle sur le déroulement du match, de mettre à nouveau l’équilibre de l’équipe en avant mais aussi de faire évoluer ses inspirations initiales pour mieux utiliser le ballon comme il l’a déclaré sur le site officiel du club marseillais (OM.net) : « Je suis pour une équipe qui utilise le ballon. C’est un travail de longue haleine. Il faut savoir récupérer le ballon, le garder et le relancer. Il faut y ajouter ensuite l’exigence du haut niveau et un équilibre dans l’équipe. Mais en étant assez simpliste, l’idée de base, l’essence du foot restera : comment je fais pour marquer un but. »
Olympique de MarseilleS’il est encore trop tôt pour étudier avec précision ce que Baup pourra faire avec ce groupe étant donné que le départ d’un ou de deux joueurs cadres est à prévoir et que des arrivées vont renforcer l’équipe, les premiers matchs amicaux contre Sion (le 8 juillet, à Sion) et le Benfica (le 13 juillet, à Sion) donneront certainement une première indication sur le système prôné en début de saison. Plusieurs cas seront intéressants dans l’effectif olympien. André Ayew a évolué au poste d’ailier gauche depuis deux saisons mais pourrait parfaitement répondre à ce milieu « liant » que recherche Baup. La position de Mathieu Valbuena sera également source de débat en fonction du choix de l’entraîneur de le positionner sur un côté ou derrière une pointe.
Justement, qui sera cette pointe et sera-t-elle accompagnée d’un deuxième larron ? Si Loïc Rémy reste au club, ce qui est loin d’être assuré, Baup devrait l’utiliser en pointe et être son fameux attaquant efficace. A moins que le coach olympien le juge apte à évoluer dans un rôle de deuxième attaquant, comme il a pu le penser avec André-Pierre Gignac, positionné à gauche en 2007/2008 avec Toulouse, avec le faible rendement que l’on connait. L’utilisation d’un joueur comme Alou Diarra pourrait également pousser Baup à utiliser une sentinelle et à moduler un peu son 4-5-1. Ses dernières années, qui lui ont permis de voir le fonctionnement de plusieurs grands clubs dans toute l’Europe, vont peut-être le pousser à une ligne de conduite bien différente. Quoi qu’il en soit, la philosophie de jeu de Baup sera rapidement mise à l’épreuve puisque l’Europa League approche à grand pas. A l’OM plus qu’ailleurs, le temps (et l’argent) est compté.