Chelsea avait-il le droit ? Chelsea est en finale de la Ligue des Champions. Pour en arriver là, le club londonien s’est défait de "l’invincible" Barça.
Depuis la double confrontation l’opposant au Barça, Chelsea est critiqué, roulé dans la boue pour le football qu’il a pratiqué. A entendre certains observateurs, les Blues n’avaient pas le droit de jouer ainsi, de refuser le jeu à ce point. Pourquoi être aussi radical ?
2008 : la sélection espagnole remporte le championnat d’Europe des nations et Guardiola prend place sur le banc de l’équipe première du Barça. Voilà, les bases sont posées et depuis maintenant quatre ans, le beau jeu s’est imposé comme inévitable et péremptoire pour jouir d’un minimum de reconnaissance. Et la qualité du spectacle proposée aussi estimable que le score du match, sinon plus. J’appelle ça la Guardiolisation du foot. En somme, faire primer la manière sur le résultat, quitte à en payer le prix.
Ecoutez l’entraineur catalan parler de sa conception du jeu et vous comprendrez : « On vit dans un monde où si tu gagnes tu es bon, et si tu perds, tant pis si tu as essayé, peu importe que tu aies eu le ballon, que l’équipe ait été parfaitement organisé et que tu aies parié sur un 3-4-3 comme l’a fait Bielsa (Guardiola parle de la sélection d’Argentine du mondial 2002). Tu perds et on dit que c’est un fiasco. Moi, je le vois d’une autre façon. » Clair et net, Guardiola, pour avancer vers ce qu’il pense bon pour le foot, à savoir le jeu pour sa beauté, est prêt à perdre quel que soit le match et son enjeu. La composition alignée au Camp Nou mardi soir est, d’ailleurs, symbolique de cet état d’esprit : un 3-4-3 pour la gloire, en cas de victoire, ou pour mourir dignement.
Le culte du beau jeu, prôné au Barça, s’est imposé comme la norme et le dessein à poursuivre au gré des succès catalans. Nous en sommes, aujourd’hui, arrivés à un point de non-retour qui nous fait perdre la raison. Le Barça ne doit pas perdre, et si c’est le cas, l’adversaire, à l’image de Chelsea, se fait sévèrement réprimander pour avoir osé contrarier la marche vers le triomphe absolu du football offensif à outrance. A croire que le Barça est le seul club qui développe un jeu digne d’être appelé football. Pourtant, la richesse du foot ne réside-t-elle pas dans le fait de regorger d’une multitude de styles ?
Alors, pourquoi, selon certains, les Blues auraient-ils dû jouer comme face à n’importe quel équipe ? Incompréhensible. On ne joue pas le Barça comme si c’était une équipe banale. Sauf si on veut se faire corriger bien sûr. Chelsea a donc eu raison de fermer la boutique, c’est la seule solution qui vaille face au Barça. Ce qui me chagrine, en revanche, c’est que cette tactique est à la portée de tous, du premier Pablo Correa venu. Mais, tant qu’on ne trouve pas autre chose, même le plus grand entraineur devra se contenter, lors des confrontations face aux Catalans, de n’être que l’égal d’un Pablo Correa.
Alors oui, en football, on a le droit de ne pas avoir un joueur à moins 70 mètres de la cage adverse pendant 75% du temps. Mais il ne faudrait pas que cela devienne une habitude. Ce dispositif doit être un privilège réservé au Barça et uniquement à lui. Un privilège, oui, car jouer ainsi, c’est reconnaitre l’immense supériorité catalane tout en se permettant d’avoir la possibilité de les battre.
Un dernier mot, Guardiola doit persévérer dans sa quête d’un football toujours plus oppressant pour l’adversaire. Et je crois en lui pour amener ses idées à leur terme car, Guardiola, même s’il a montré quelques signes de faiblesses ces derniers temps, est un jusqu’au-boutiste. Il m’a fait peur en déclarant que « ceux qui gagnent ont raison » après le match de Stamford Bridge ou encore après le match retour : “Peut-être l’un de mes torts est-il de toujours vouloir attaquer à tout va, peut-être devrais-je ménager certains temps de pause où nous temporiserions un peu plus. » Avant de se reprendre : « Mais ce n’est pas notre style de jeu. » Ce que dit Guardiola est vrai pour tout le monde et partout, mais pas pour lui, ni au Barça. Guardiola pense différemment et ne doit pas cesser d’appliquer ce en quoi il croit au plus profond de lui. La beauté du foot en dépend. Vive le Barça !
_________________ "Tudor n’a aucune raison de l’aligner, ça peut être que mauvais pour lui si Payet est bon" "Anigo: tactiquement il est au dessus de Tudor"
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